UN WEEK-END ..DE FEROCES par Jean-Marc :

Vendredi 29 Août, depuis le temps qu’on l’attendait… le voici enfin. 6H3O, les féroces embarquent direction Chamonix. Dom n’est pas en retard, Hervé n’a (presque) plus mal, Thierry B est prêt à en baver, Daniel a déjà les temps en tête et moi , je suis impatient… On est tous dans notre course . On se retrouve vite en tenue sur le premier parking obligatoire de Cham. Direction les dossards… La vérification des sacs et les formalités indispensables sont assez vite réglées, il me semble que la cohue , ça devait être hier soir, enfin tant mieux, ça nous évite de piétiner… Le temps de se préparer et nous voilà partis en bus pour Courmayeur. On en profite tous pour peaufiner les derniers réglages (alimentaires). Dom nous sort une dernière trouvaille un peu verdâtre et pâteuse mais qu’il a l’air d’apprécier. Thierry avale un vrai casse-dalle savoyard…Hervé nous aurait bien servi un petit rouge comme a son habitude, mais ça faisait pas trop sérieux. Daniel croque avec appétit dans son gâteau sport et j’essaie d’avaler un dernier bout de cake. On débarque à Courmayeur… l’ambiance et le soleil commencent à chauffer. On retrouve Thierry E et Véro qui étaient partis la veille. On rejoint la ligne de départ, après avoir déposé nos sacs. La foule est de plus en plus dense. La pression monte Dom Hervé et les Thierry restent un peu à l’ombre, tandis que je rejoint Daniel (déjà dans la course) un peu plus loin sur la ligne … 10H30, le pouls s’accélère on écoute avec fébrilité l’hymne officiel de l’UTMB qui passe en boucle… Les 3 hymnes nationaux (Suisse, Italie, France) ne font pas baisser la pression… Les gorges commencent a se nouer. Le speaker nous présente un jeune coureur qui va faire la course avec le dossard d’un copain décédé en montagne la semaine passée… J’essaie de me cacher mais les larmes sont là… et toujours « les chariots de feu » qui nous prend les tripes… … les minutes s’égrainent…Zut j’ai oublié de souhaiter une bonne course aux copains… J’essaie de me retourner pour les apercevoir… trop de monde… Je leur souhaite en pensée, encore quelques mots banals avec Daniel qui est aussi ému que moi. C’est un moment magique que nous vivons… Le compte à rebours des dernières secondes est fait par tous les coureurs. 11 H l’émotion est au comble. Ca y est, les fauves sont lâchés… La rue qui s’étire devant nous est déjà noire de coureurs, pourtant, on avait l’impression d’être bien placés. Enfin, on a le temps de remonter. Un coup d'oeil avec Daniel « ça va ?» : « ça va ! ». Je le sent sur motivé. Je vais en baver si je peux rester un moment avec lui. En filant sur Planpincieux on a déjà remonté pas mal de monde. Il fait très chaud. Les montagnes sont super belles… Sur le sentier de Bertone, je pense à Hervé G, à la reco, on y était monté aussi plein pot début Août… Daniel double toujours et je reste dans son sillage ça à l’air d’aller. On arrive à Bertone km 12 où l’on doit rejoindre le refuge en contrebas pour le pointage. Ca va pas trop de monde, un gobelet de coca et c’est reparti. En remontant sur la butte on croise ceux qui descendent au refuge. Je devine le bob de Dom… même pas le temps de lui faire signe et nous voilà déjà sur l’arête des Monts de Saxe… L’hélico est tout près de nous et le vent de ses pales nous donne un peu de fraicheur. On est bien. Petit à petit on remonte la file qui s’étire de plus en plus. Les aiguilles à gauche sont sublimes. Avec le beau temps et ce paysage, on croit rêver. On devine le Mt Dolent majestueux, toujours ce paysage superbe… Ca va j’ai les bonnes jambes. Au sommet de la tête de la Tronche on est toujours ensemble. J’ai le moral… dans la plongée poussiéreuse vers le Col Sapin, on passe au moins 10 personnes, ça motive… Un petit pipi dans la nature et on file sur Bonati. Je fais la longue descente en imitant Daniel et Bonati arrive plus vite que prévu… Deux gobelets de coca, 2 ou 3 barres, on fait le plein du camel… 5 minutes maxi et le regard de Daniel m’indique qu’il faut y aller. « On va faire un grand truc » me dit-il « il faut qu’on soit à Champex à 19 H et on y sera ».Une complicité s’est installée… les longs discours restent inutiles…ses yeux brillent quand il parle de ses enfants…ou quand il sort le gobelet de son fils aux ravitos...ce sont ces détails qui nous permettent de tenir… Une longue traversée un peu montante et on replonge sur Arnuva. Je pense aux copains Thierry B, Thierry E, Dom, Hervé B et son manque de longues sorties, son mal de genoux, ses douleurs au dos mais je sais que c’est un solide… Avant d’arriver au ravito on entend la clameur qui monte la pente. Une foule bruyante attend les concurrents, ça fait chaud au cœur… Les frissons reviennent malgré la chaleur… Une soupe aux vermicelles me paraît sympa, je l’avale rapido… 2 poignées de raisins, du coca et hop pas trop le temps de trainer. « 19 H à Champex » qu’il a dit. Direction Gd Col Ferret mais la soupe ne veut pas passer… J’ai du mal... Je fais signe à Daniel d’y aller mais il insiste et m’encourage toute la montée… INTERMINABLE. « ça va revenir ». J’en chie un max… La tête tourne et les crampes arrivent déjà aux mollets… Je pense un peu à l’abandon. Mais dans ma souffrance, je vois des gens qui sont pire que moi, alors j’insiste… Il est 16 H au sommet et les encouragements de Véro me redonnent le moral. (Elle a fait toute la montée à pied pour nous soutenir en haut !) J’essaie d’y croire… J’enlève mes chaussettes qui me serrent, peut-être que les crampes venaient de ça… On verra. Dans la descente sur la Fouly j’ai toujours les crampes mais je m’accroche. Daniel m’attend et je ne doit pas le décevoir. Il me donne un comprimé à l’arnica et me convint que ça va passer. C’est peut-être dans la tête mais au bout d’un moment ça va mieux. Je peux courir presque normalement. On passe la Fouly sans encombre et sans trainer surtout ! et nous voilà direction Praz de fort. On fait un bon bout de route avec une petite réunionnaise sympathique (5éme femme à l’arrivée). Un petit ravito improvisé par 4 enfants nous fait chaud au cœur. On boit un coup pour leur faire plaisir et direction Champex. Dans la montée les crampes reviennent, je serre toujours les dents. Je pense à Hervé qui doit être sur le point d’entamer sa galère. Normalement à Champex il y a du monde qu’on connaît. A 19 H pile, comme prévu, ( c’est un sage le Daniel) on arrive à la station. Je vois Jean-Pierre et puis Véro qui vont faire toute la nuit. Surprise ! je vois Dom en tenue de course (un peu juste dans le Gd Col Ferret lui aussi, il a arrêté à la Fouly, il s’en mordra les doigts plus tard !) On s’arrête un quart d’heure le temps de se relaxer. Dom s’occupe de nous comme un père. On repart donc assez vite direction Bovine (en traversant Champex, on passe devant le resto où l’on avait mangé à la reco, avec toute l’équipe début Aôut. Encore des souvenirs ! Et la serveuse nous reconnait et nous salue… Sympa ! On fait la montée de jour, comme prévu on met la frontale en haut puis plongée sur la ForclazNoëlle et Josette qui nous avaient raté à Champex sont là avec Dom. On s’arrête 2 minutes et on les retrouvera à Trient. Un peu plus bas, c’est là que je retrouve le moral. L’accueil de la population sous la tente est fantastique … Et puis Noëlle, Josette et Dom sont là, on parle un peu, on se ravitaille et puis Alexandre qui suit comme beaucoup notre progression sur le NET à téléphoné à Noëlle pour lui dire que j’étais 3éme vétéran 2 et qu’on était dans les 100 premiers au scratch… Inespéré… Rien de tel pour me requinquer… Et nous voilà déjà reparti. Cette fois j’ai la rage mais toujours des poteaux à la place des jambes… Les montées deviennent un régal mais les descentes restent mon chemin de croix. Daniel me pousse toujours. Il n’aura pas arrêté de me soutenir. Si je veux rester sur le podium, c’est pour lui, pour Hervé qui sera fier de nous et pour tous les féroces qui en bavent aussi. On traverse Catogne puis la frontière Franco-Suisse aux Esserts, la descente sur Vallorcine est terrible, les cuisses me font souffrir et une ampoule sous le pied droit rend mes pas encore plus hésitants. On devine les lumières de Vallorcine et comme souvent sur le parcours une frontale se présente en face de nous je dis bonjour naturellement et la personne se met à rigoler c’est Alexandre mon fils qui vient nous accompagner un petit bout… Ca me fait chaud au cœur, il est minuit passé. Au ravito de Vallorcine Noëlle , Josette, Dom et Jean-Pierre sont toujours là… Pour eux aussi je ne doit pas baisser les bras, ils sont restés toute la nuit pour nous soutenir. Alexandre nous accompagne jusqu’au Col des Montets… On reste bien unis et motivés et on gagne toujours des places… Il est 1 H 30 et on attaque La Tête aux Vents. On ne reverra plus nos supporters jusqu’à l’arrivée, dans 2 H 30 (normalement). Jusqu’au sommet on fait le train et personne ne nous a suivi. Mais la dernière heure sera terrible. Daniel qui avait des fourmis s’en va dans la descente, il gagnera 20 places chapeau et MERCI Monsieur BIOLLAZ… En s’en allant il me crie encore de m’accrocher jusqu’au bout. Je vois sa frontale qui s’éloigne petit à petit… Chaque pas est un calvaire. On passe la Flégère. La descente du chemin est terrible je ne peux plus lever les pieds… Je trébuche souvent et la chute attendue arrive après le passage de la Floria . Plus de peur que de mal, les mains écorchées je fini à l’énergie. Et au bout d’une longue ligne droite en sous bois , je vois les lumières orangées des rues de Chamonix… Dernier kilomètre… Les rues vides... Quelques promeneurs et la ligne enfin, épuisé mais heureux… La même impression qu’au départ, les larmes aux bords des yeux, le sentiment d’avoir fait un truc .
A refaire
Merci à ma famille
Merci à tous ceux qui nous ont encouragé et supporté au milieu de la nuit ou de leur domicile.
Pour DANIEL , HERVE G, THIERRY E , HERVE B , THIERRY B , DOM qui sont allés au bout de la souffrance.
Jean Marc